On admet que 80 % des maladies dites rares sont d’origine génétique. Les maladies rares touchent moins d’une personne sur 2 000. Prises séparément, ces maladies sont très peu fréquentes, voire exceptionnelles, mais à l’échelle de l’Europe, elles touchent 35 millions de personnes. En France, près d’une personne sur 20 est concernée. Une anomalie génétique ou une malformation congénitale est à déplorer dans près de 3 % des naissances et peut entraîner de nombreux handicaps par la suite.
Des maladies qui prennent naissance dans notre génome
Les maladies génétiques surviennent en raison d’une altération dans l’entité de base qui compose notre organisme, la cellule, au niveau de notre génome. Le génome représente l’ensemble de l’information génétique d’un organisme : il est constitué de la fameuse molécule d’ADN et est contenu dans chacune de nos cellules sous la forme de chromosomes. Le génome contient :
- Des parties dites codantes : les gènes qui contiennent l’information pour produire des protéines, chargées de remplir des fonctions précises dans la cellule, voire d’autres molécules. Le génome humain contient environ 22 000 gènes.
- Des parties non-codantes qui représentent 98 % de l’ADN : ces régions ne portent pas d’information utile pour la production de protéines. Parfois appelées « matière noire » de l’ADN, elles sont un domaine de plus en plus exploré par les chercheurs pour comprendre leur rôle et leur influence éventuelle sur le fonctionnement cellulaire et à plus grande échelle de l’organisme.
Chacune de nos cellules – sauf les cellules de reproduction – compte 46 chromosomes correspondant à 23 paires de chromosomes. Chaque chromosome d’une paire est hérité soit de la mère, soit du père. Les gamètes ou cellules de reproduction ne comptent qu’une version de chaque chromosome.
Plusieurs formes de maladies génétiques
On distingue 3 formes de maladies génétiques en fonction de l’altération à leur origine : les maladies chromosomiques, monogéniques et polygéniques.
Près d’1 % des enfants naît avec une anomalie chromosomique : le chromosome, la forme compactée de l’ADN associé à des protéines, présente une anomalie de structure, ou est en trop grand nombre dans la cellule. La pathologie la plus fréquente est la trisomie 21, caractérisée par la présence de 3 chromosomes 21 au lieu de 2, l’un issu de la mère et l’autre du père.
Près de 7 000 pathologies dites génétiques résultent de la présence d’une mutation dans un seul gène. Ce sont des maladies monogéniques. Dès lors qu’un gène est touché, il s’en suit la production de protéines défaillantes ou leur absence. Or, ces molécules sont censées remplir des fonctions bien précises dans les cellules. L’endommagement d’un seul gène perturbe de façon plus ou moins nocive de multiples organes, impactant la vie des personnes concernées. L’une des plus fréquentes est la drépanocytose. Cette anémie sévère est provoquée par la mutation d’un gène qui produit la bêta-globine, un des composants de l’hémoglobine. L’hémoglobine ainsi produite tend à polymériser lorsque la concentration d’oxygène diminue. C’est une maladie héréditaire, ce qui est loin d’être le cas de toutes les maladies monogéniques.
Les mutations survenant au niveau d’un gène peuvent avoir bien d’autres conséquences. Ainsi, l’équipe de Corinne Antignac à Imagine a été la 1ère en 2001 à mettre en évidence une origine génétique au syndrome néphrotique cortico-résistant. Chez ces patients, suite à la mutation d’un gène, le rein joue mal son rôle de tri des macromolécules, et des protéines normalement retenues dans le sang s’accumulent dans l’urine.
Il existe aussi des maladies impliquant plusieurs gènes. Ce groupe de maladies, de loin le plus fréquent, compte le diabète, l’hypertension etc. L’étude des mécanismes en jeu est extrêmement complexe.
Qu’est-ce qu’une mutation ?
Point de départ des maladies génétiques, une mutation est une modification de l’information génétique. Survenant spontanément, la mutation peut prendre des formes très variées : du changement d’une seule lettre dans le code génétique à l’existence de chromosomes surnuméraires comme dans la trisomie.
Toutefois, toutes les variations du génome n’aboutissent pas systématiquement à une maladie. Il existe de nombreuses variations entre le génome de deux individus parmi les 6 milliards de nucléotides, ou dit plus simplement, des lettres formant le code génétique, qui le composent. On parle alors de variants. Si on compare le génome de deux individus pris au hasard, on dénombre 3,2 millions de « lettres » différentes, ce qui ne représente qu’une variation de 0,01 %.
Toute la difficulté pour les généticiens est de distinguer les mutations à l’origine d’une maladie et les variants qui marquent notre individualité.
Une maladie génétique n’est pas forcément héréditaire
L’un des autres défis des analyses des maladies monogéniques est de savoir si la mutation identifiée est héritée ou si elle est apparue chez l’individu malade. Dans ce dernier cas, on parle de mutation de novo.
Si une mutation de novo apparait dans les tous premiers stades de la fécondation, elle peut ensuite être présente dans toutes les cellules d’un individu et donc dans les cellules germinales qui vont servir à la reproduction. A ce moment-là, il y a risque de transmission à la descendance. Toutefois, cela ne signifie pas forcément que l’enfant sera malade. Tout dépend du mode d’expression de la maladie.
- Les maladies autosomiques récessives comme la mucoviscidose et la drépanocytose : leur apparition nécessite la mutation des deux copies du gène, celle héritée de la mère et celle héritée du père. Chaque parent est porteur de la mutation sans pour autant développer la maladie. En revanche, la probabilité que les parents transmettent les deux gènes mutés est de 1 sur 4.
- Les maladies autosomiques dominantes : il suffit d’une mutation d’un des deux gènes pour que la maladie survienne. Cette mutation peut être héritée d’un des deux parents qui est alors lui-même malade - ce qui est par exemple le cas de l’achondroplasie, la forme de nanisme la plus courante - ou alors survenir spontanément.
L’enjeu des maladies génétiques : identifier le gène pour comprendre et traiter
L’identification du gène altéré est indispensable à la poursuite des recherches pour mieux comprendre la maladie. C’est seulement à cette condition que les chercheurs peuvent ensuite explorer les mécanismes cellulaires en jeu et surtout tenter de les restaurer. Ce principe a prévalu à la création d’Imagine : mettre en synergie les expertises des médecins et des chercheurs dans un même lieu pour faire progresser la recherche sur les maladies génétiques et les guérir. Même s’il y a eu d’immenses améliorations liées aux Plans nationaux Maladies Rares, les jeunes patients et leur famille arrivent parfois à Imagine après des mois, voire des années, d’errance diagnostique.
Tout est alors mis en œuvre pour identifier les origines de la maladie. Souvent, les familles nous expliquent que l’arrivée à Imagine est vécue par eux comme une dernière chance. Envahies par le doute et souvent le découragement, elles trouvent en Imagine un lieu où des médecins et des chercheurs vont tout faire pour donner un nom à la maladie dont souffre leur enfant, et l’espoir renait au sein de ces familles.
Et nommer la maladie n’est pas toujours facile. Avec plus de 7 000 maladies génétiques recensées à ce jour (et le chiffre ne cesse de croître), ces maladies le plus souvent rares sont extrêmement variables dans leur expression et très hétérogènes dans leurs fondements génétiques. Identifier le gène représente souvent un pas important, parfois décisif, vers le décryptage des mécanismes et la mise au point de traitements pour les soigner.