Publié le
Il existe près de 500 défauts génétiques responsables de différents déficits immunitaires héréditaires. Parmi eux, les déficits immunitaires combinés sont caractérisés par une altération des deux principaux fantassins du système immunitaire : les lymphocytes T (pour tueuses) et les lymphocytes B, dont le rôle est de produire les anticorps chargés de détecter et de neutraliser les agents pathogènes. Les enfants qui naissent avec ces maladies ont un système immunitaire fragilisé, terrain à des infections sévères.
En menant une analyse génétique et moléculaire sur une cohorte de 7 patients issus de 6 familles réparties dans le monde, un consortium international dont fait partie le laboratoire de lymphohématopoïèse humaine, dirigé par Isabelle André, a découvert et caractérisé un tout nouveau type de mutation responsable d’un déficit immunitaire combiné. Les résultats sont publiés dans la revue Science Immunology.
Un défaut de production d'anticorps...
« En plus de leur déficit immunitaire, les patients de notre cohorte présentaient une agammaglobulinémie atypique. Contrairement à une agammaglobulinémie classique, caractérisée par une absence d’anticorps et de lymphocytes B dans la circulation sanguine, nos patients possédaient, eux, des lymphocytes B. Toutefois, ceux-ci restaient bloqués à un stade de différenciation les empêchant produire d’anticorps », explique Sven Kracker, chercheur et « theme leader » au sein du laboratoire.
« Cela explique pourquoi le système immunitaire des patients n’est pas capable de contrôler des infections par des agents pathogènes, même bénins », ajoute Romane Thouenon, PhD et première co-autrice de la publication.
... lié à une mutation génétique encore jamais observée
Les chercheurs ont pu en trouver la cause : un nouveau type de mutation encore jamais observée du gène IRF4, codant une protéine impliquée dans la régulation de l’expression de gènes clés dans la différenciation des cellules immunitaires, en particulier des lymphocytes B et T. Cette nouvelle mutation – dite multimorphe – ne rentre pas dans une classification classique. « Lorsque l’on parle de mutation, il s’agit souvent d’une perte de fonction (la protéine n’est plus fonctionnelle) ou d’un gain de fonction (la protéine gagne une nouvelle fonction), indique Sven Kracker. Or nos travaux mettent en évidence un gain de fonction associé à une perte de fonctionnalité de la protéine IRF4 ».
En effet, la mutation caractérisée par les chercheurs n’empêche pas IRF4 de se fixer à l’ADN mais induit une modification de son activité, bloquant de fait la maturation de lymphocyte B et donc la production d’anticorps. Cette découverte met ainsi en évidence un tout nouveau type de mutation et éclaire les mécanismes immunologiques moléculaires en cause dans ces déficits immunitaires.