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La protéinose alvéolaire pulmonaire (PAP) est une maladie rare caractérisée par l'accumulation du surfactant, substance dérivée des alvéoles pulmonaires, riche en graisse et protéines qui tapisse l’intérieur des poumons. Chez les patients avec un diagnostic de PAP, l’élimination de ce surfactant est fortement perturbée, ce qui conduit à un mauvais échange gazeux. Un essoufflement progressif, une toux et des expectorations chroniques sont très fréquemment observés chez ces patients.
Anna-Lena Neehus, dans le cadre de son projet de thèse au sein du laboratoire de recherche Génétique Humaine des Maladies Infectieuses, a analysé les données génétiques de neuf enfants souffrant de PAP (maladie débutant dans l’enfance) et d’infections, notamment par les mycobactéries. Elle a ainsi identifié des mutations rares pathogènes dans le gène CCR2 chez ces neuf patients. Ce travail a été réalisé sous la direction du Pr Bruce Trapnell, du Pr Jean-Laurent Casanova* et du Dr Jacinta Bustamante**.
De manière générale, le nombre de monocytes, une des populations des « globules blancs », augmente en cas d’infection, d’inflammation, d’allergie ou de dysfonctionnement de la moelle osseuse. La protéine CCR2, codée par le gène du même nom, transmet les signaux indispensables à la migration des monocytes du sang vers les tissus, dont le poumon. Au cours de cette migration, les monocytes deviennent des macrophages, cellules capables d'ingérer et de détruire les agents pathogènes et les « déchets » cellulaire, tels que le surfactant.
Chez les enfants présentant un défaut dans le gène CCR2, le nombre de macrophages détectés dans les poumons (et même dans le produit obtenu après lavage des poumons, le LBA) est diminué de moitié par rapport à celui observés chez des enfants sains. La production de monocytes par la moëlle osseuse n’est pas altérée et le nombre de monocytes dans le sang périphérique reste normal. Le déclenchement de la PAP est donc dépendant de la migration des monocytes vers les tissus. Le dosage de la cytokine CCL2, protéine qui se fixe sur CCR2, dans le sérum et le LBA est élevé chez ces neuf patients. Le dosage de ce biomarqueur sur un simple prélèvement sanguin peut être un nouvel outil pour le dépistage du déficit en CCR2 et la recherche des mutations dans ce gène permettant un diagnostic plus rapide.
Les maladies pulmonaires diffuses pédiatriques sont hétérogènes, et ne disposent pas de diagnostics ou de thérapies spécifiques ; elles sont classées sur la base de manifestations cliniques, radiographiques et pathologiques. Ces travaux ont ainsi permis d’identifier une nouvelle maladie génétique prédisposant aux infections chez des enfants atteints de PAP héréditaire : le déficit en CCR2. Ces résultats ouvrent également la voie à des possibilités thérapeutiques : par greffe de moëlle osseuse, il est possible de corriger le déficit en CCR2 chez les patients, et de rétablir ainsi la migration des monocytes notamment vers les poumons et les ganglions.
Référence : Human inherited CCR2 deficiency underlies progressive polycystic lung disease
doi: 10.1016/j.cell.2023.11.036
Corresponding authors :
*Pr Jean-Laurent Casanova : PU-PH, Université Paris Cité et Université Rockefeller, Institut Imagine, Hôpital Necker Enfants Malades, AP-HP, co-fondateur du Laboratoire de Génétique Humaine des Maladies Infectieuses
** Dr Jacinta Bustamante : MCU-PH, team leader-Institut Imagine, Centre d’Etudes de Déficits Immunitaires, DMU BioPhyGen, Hôpital Necker Enfants Malades, AP-HP.Centre-Université Paris Cité
Communiqué de presse disponible sur le site de l'AP-HP