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C’est le cas d’une fillette de 11 ans décédée à Paris des suites d’une infection d’une hépatite A qui a alerté le Pr Casanova et son équipe. Comme l’indique l’OMS, « contrairement à l’hépatite B et à l’hépatite C, l’hépatite A n’entraîne pas de maladie hépatique chronique et est rarement mortelle. » Alors pourquoi une maladie qui chez la plupart des personnes infectées se soigne relativement facilement entraîne la mort d’une adolescente ? Cette question est au cœur des recherches de Jean-Laurent Casanova, professeur à l’Université Paris Descartes/Hôpital Necker Enfants malades (AP-HP), professeur à l’Université Rockefeller/Howard Hughes Medical Institute à New York et co- fondateur du laboratoire Inserm de génétique humaine des maladies infectieuses, organisé en deux branches, l’une au Rockefeller à New York et l’autre à l’institut Imagine : son équipe a déjà montré que de nombreuses maladies infectieuses – tuberculose, grippe, etc. – avaient aussi une origine génétique.
Dans leur dernière publication parue dans Journal of Experimental Medicine, ils ont identifié et ce, pour la première fois, une cause génétique de l'hépatite virale fulminante. « Cette forme extrêmement sévère n’a pas d’explication à ce jour, rappelle le Pr Casanova. Elle se traduit par la destruction du foie et, en l’absence de greffe, le plus souvent par la mort du patient. » Aujourd’hui, rien ne permet de prédire quel patient infecté va développer une hépatite fulminante.
L’analyse du génome de la fillette décédée a mis au jour une mutation des deux copies du gène IL18BP produisant une protéine altérée. « Cette altération empêche la protéine de jouer correctement son rôle, à savoir la neutralisation de la cytokine IL-18 qui induit une réponse immune et déclenche l’inflammation, explique le professeur. En conséquence, IL-18 accroît la capacité des cellules « tueuses » du système immunitaire à cibler et détruire les cellules du foie. »
Une nouvelle fois, l’équipe du Pr Casanova montre qu’une maladie infectieuse est en fait une maladie génétique. Cette découverte ouvre en outre la voie à des pistes thérapeutiques. Car, comme le souligne Jean-Laurent Casanova, « l’administration d'IL-18 BP – déjà utilisé en clinique pour d’autres pathologies [NDLR], pourrait venir remplacer la protéine défaillante et ainsi neutraliser la cytokine et ses effets délétères. » Aujourd’hui, le chercheur lance un appel pour poursuivre dans cette voie et identifier d’autres patients atteints d’hépatite fulminante suite à la présence d’une altération génétique créant un terrain propice à son développement.
Inherited IL-18BP deficiency in human fulminant viral hepatitis
Serkan Belkaya, Eleftherios Michailidis, Cecilia B. Korol, Mohammad Kabbani, Aurélie Cobat, Paul Bastard, Yoon Seung Lee, Nicholas Hernandez, Scott Drutman, Ype P. de Jong, Eric Vivier, Julie Bruneau, Vivien Béziat, Bertrand Boisson, Lazaro Lorenzo-Diaz, Soraya Boucherit, Mylène Sebagh, Emmanuel Jacquemin, Jean-François Emile, Laurent Abel, Charles M. Rice, Emmanuelle Jouanguy, Jean-Laurent Casanova
DOI: 10.1084/jem.20190669 | Published June 18, 2019